Contribution d'ECCLA à l'enquête publique sur le PDPGDND de l'Aude
(Plan Départemental de Prévention et Gestion des Déchets Non Dangereux)
Le 8 janvier 2015
Il faut d'abord se féliciter de voir enfin arriver un nouveau plan départemental sur les déchets car, en fin de compte, celui qui est actuellement valable date de 1994. Beaucoup de choses ont changé depuis cette époque, les lois Grenelle et, en particulier, une insistance très forte sur la priorité à donner à la prévention des déchets.
(Les questions posées par ECCLA sont en italique dans le texte)
Remarques générales
Avant d'entrer à l'intérieur du plan, force est de constater que le cadre national et départemental rend en partie caduque ce plan, même si l'état de l'étude est intéressante sur de nombreux aspects.
Sur le diagnostic
Assez bien détaillé, ce diagnostic appelle cependant plusieurs remarques :
A/ Le retard de l'Aude
Le plan signale effectivement le retard de l'Aude par rapport à la moyenne nationale que ce soit pour la production de déchets (plus importante) ou le recyclage (moins important) ; ainsi, les collectes sélectives produisent 65kg par habitant et par an dans l'Aude alors que c'ets 77 kg au niveau national.
Un autre élément important de ce retard est la quasi absence de Programme Local de Prévention (PLP). Il n'en existe qu'un à Carcassonne couvrant donc environ 20% des audois, et encore, il est très récent. Ce plan départemental peut effectivement programmer que toutes les collectivités territoriales devront avoir mis en place un PLP, mais aujourd’hui ce sera sans aide financière de l'ADEME, alors qu'elle a aidé un très grand nombre de communes au début de la mise en place de ces PLP, un retard qui va donc se payer cher.
B/ Les chiffres inexplicables ou inexpliqués
Les biodéchets
Un chiffre est sorti du chapeau sans explication : 8000 tonnes de biodéchets produits par les gros producteurs. Or, la réglementation nationale sur les gros producteurs de biodéchets est évolutive de 2012 à 2016.
Au 1er janvier de 2012, n'étaient soumis à cette obligation que les producteurs dépassant 120 tonnes de biodéchets à l'année. En 2016, ce sera tous ceux qui dépasseront 10 tonnes à l'année. On ne sait pas sur quelle base sont évalué les 8.000 tonnes.
Les Déchets d'Activités Economiques
Un autre chiffre est sorti du chapeau de façon encore plus incongru : les DAE. On en a identifié 24.300 tonnes et on propose d'en prendre en compte 136.700 tonnes supplémentaires, d'où un total de 161.000 tonnes de DAE. Un tel chiffre paraît délirant et peu utile, d'autant que les approximations se poursuivent :
Les boues de STEP
Attention aux boues de STEP : si près de 20.000 tonnes, soit la moitié du gisement, sont effectivement valorisées par compostage, toutes les plus petites stations (plus de 300) font de l'épandage la plupart du temps « sauvage » sans plan d'épandage (attention aux forages d'eau potable qui n'ont pas de périmètre de protection éloigné).
Pourquoi l'installation de Castenaudary qui devait traiter des boues de STEP a arrêté et que deviennent les boues de Castelnaudary ?
Le réseau de déchèteries
Le réseau de déchèteries est passé de 48 déchèteries en 2004 à 58 déchèteries aujourd'hui. Cela paraît largement suffisant. L'amélioration ne passe plus maintenant par une augmentation du nombre mais par une meilleure formation des personnels d’accueil pour éviter que trop de matériaux partent au tout venant.
Enfin, une remarque d'usager : les barrières de sécurité posées pour éviter que les personnes ne tombent dans les bennes compliquent beaucoup les choses.
Le coût
Le coût 137€ par habitant et par an, supérieur de 50% à la moyenne nationale ne peut qu'interpeller surtout que la quantité par habitant n'est supérieure que de 3%. Il manque vraiment une analyse de ce qui fait ce coût : des fréquences trop importantes en milieu urbain ? Trop de déchèteries en milieu rural pour trop peu d'habitants ? Autre ?
Sur les objectifs
Une première remarque sur le tableau page 14 du résumé non technique. La seconde ligne (% de recyclage des DMA) n'aurait pas du être placée juste après la 1ère ligne qui ne concerne que les OMA. Résultat, on ne s'y retrouve pas dans les calculs. A replacer juste après la ligne déchets occasionnels car la seconde ligne s'applique aussi à ces déchets.
Objectifs de prévention
L'objectif global de réduction de 12,5 % d'ordures ménagères et assimilés est intéressant et même ambitieux, puisque le niveau national est à 7% de réduction. Cependant, on ne voit absolument pas la moindre suggestion de mesure pour y parvenir, hormis de dire que 100% des collectivités territoriales doivent être couvertes par un programme de prévention et qu'un groupe de travail va être mis en place.
Par ailleurs, il s'agit un peu d'un objectif en trompe l'oeil ; en effet, si les ordures ménagères collectées sont réduites de 12,5%, les déchets occasionnels sont quasiment constants sur la période du plan, voire même en légère augmentation. Du coup, sur la totalité des déchets ménagers (collectes+ déchèteries) la réduction est en fait de 6,5%, soit exactement ce qui est demandé au niveau national (7%).
Objectifs de recyclage
Les objectifs de recyclage verres et emballages sont raisonnables, mais pas très ambitieux. Ainsi, pour prendre un exemple, c'est à la fin du plan, en 2026, que 75% des emballages seront recyclés dans l'Aude. Pour le niveau national, ces 75% de recyclage des emballages doivent être atteints en 2015, la France en étant aujourd'hui déjà à 67% !!!
Les objectifs pour les déchets occasionnels sont très ambitieux, mais normalement atteignables si la formation des salariés des déchèteries est renforcée et si des campagnes de communication sont mises en place à destination du grand public et des commerçants/artisans pour expliquer que ce sont des déchets triés qui doivent arriver pour l'essentiel en déchèteries afin de réduire ce qui part au tout venant.
L'affichage final affiché de 49% de recyclage sur les DMA à la fin 2026 est obtenu de façon discutable puisqu'il n'y a que 27% sur les OMA et 77% sur les déchets occasionnels. Cela signifie que les élus ne veulent pas demander d'efforts supplémentaires aux citoyens – ce en quoi ils ont tort – et que c'est avec des prétraitements sur les déchets occasionnels qu'ils comptent atteindre un niveau de recyclage acceptable.
Mais, il reste un vrai point noir. Les ambitions en matière de fermentescibles sont inacceptables. En effet, il est bien acté que les gros producteurs de biodéchets (10 tonnes/an à partir du 1er janvier 2016) sont tenus de mettre en place une filière de traitement dédiée facilitant le retour à la terre. Dix tonnes par an, c'est très peu. Toutes les restaurations collectives, voire tous les restaurants un peu importants vont être concernés. A partir du moment où les filières de traitement des biodéchets vont exister, la collecte sélective des biodéchets est tout indiquée accroître le recyclage. Il est donc parfaitement incompréhensible que le PDPGDND 11 acte et/ou prévoit que les installations nouvelles d'enfouissement des déchets fonctionnent en mode bioréacteur, ce qui suppose qu'on va continuer pendant des dizaines d'années à apporter les déchets fermentescibles pour y être enfouis afin que leur fermentation produise du gaz. Et le plan renforce cette option en précisant explicitement :
« Le Plan ne prévoit pas d’objectif de collecte spécifique et de recyclage de ces biodéchets issus des ménages. Les objectifs de recyclage de la Fraction Fermentescible des OM (FFOM) prévus par le Plan sont liés au développement du compostage domestique individuel ou de proximité. »
En conclusion : tous ceux qui n'ont pas de jardins ou qui habitent en collectif sont priés de ne pas trier leurs biodéchets…
Les Déchets d'Activités Economiques
En ce qui concerne les déchets d'activités économiques, il devrait exister un seul objectif essentiel : identifier sérieusement le gisement. Passer de 15% de gisement identifié à 30% en 2026 est largement inacceptable. Quant au taux ce recyclage de ces DAE, il n'a évidemment aucun sens puisque tous ceux qui sont inconnus sont supposés recyclés à 75%.
Reste la question déjà posée plus haut : pourquoi les 44.000 tonnes identifiées en 2004 sont devenues 24.000 tonnes identifiées en 2011 ?
Sur l'évaluation environnementale
Nous n'allons pas entrer dans le détail des chiffres ce qui demanderait un temps considérable d'autant qu'il y a surement ici où là quelques erreurs (page 69 le PCI du gazole n'est pas 30,08kJ /l mais plutôt 1000 fois plus), mais poser quelques questions et faire quelques suggestions :
Beaucoup de km
Attention : nuisances et pollutions
Recyclage aluminium
On recycle très peu l'aluminium alors que c'est un métal dont le recyclage est exceptionnellement intéressant sur le plan énergétique et environnemental. En fait, le mot aluminium n'apparait même pas dans le dossier.
Synthèse des propositions d’ECCLA
En guise de conclusion ECCLA reconnaît un effort important de mise en page et de graphiques pour aider à la compréhension et espère que ce plan va être définitivement adopté car l'Aude a vraiment besoin d'un plan à jour, même si les ambitions de celui-ci sont insuffisantes.
Les questions soulevées par ECCLA ont été mises en italique tout au long du texte et les propositions sont synthétisées ci-dessous
Sur l'aspect diagnostics
Sur l'aspect objectifs
Sur l'aspect coûts
Sur l'aspect traitements
En guise de conclusion
Une fois que le plan aura été adopté, il faudra vraiment qu'il y ait un suivi, ce qui n'a jamais pu avoir lieu avec les annulations successives des deux plans précédents, d'où une vraie difficulté à évaluer les résultats des politiques mises en œuvre
Pour ECCLA, sa Présidente, Maryse Arditi